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Mue


J’aurai pu ne pas partir. Ne jamais sortir du cercle blanc que j’avais tracé sur le sol. Faire de cette vie une œuvre secrète. N’être jamais démasqué. J’aurai pu garder mon temple infranchissable. Ne pas laisser la pluie et le vent délaver la craie. J’aurai pu empêcher. M’interposer quand mes frontières se sont fissurées. J’aurai pu étouffer le murmure qui montait en moi. Ne pas laisser les voûtes résonner de mon chant. Construire un chemin qui ne doit rien à personne. Un chemin propre et lisse pour ne jamais risquer. J’aurai pu traverser cette vie sans ouvrir les yeux. Sans même laisser rentrer l’air dans mes poumons. Sans me laisser rejoindre. J’aurai pu arracher d’un seul geste le coquelicot entre les pierres. Et le laisser périr, assoiffé, consumé. J’aurai pu. Sans doute.


Mais je n’aurais rien su de l’oiseau fou qui déchira la nuit de son chant. Ni de cette bourrasque fiévreuse qui m’emporta à ton approche. Rien de ce soleil de mai, haut et clair dans mon ciel intérieur, tant je me sens vivant. Et je n’aurais jamais vécu cette deuxième naissance. Ce frémissement, léger et sûr, à l’orée du monde. Si bouleversant. Si bouleversant …


Au fond, je suis parti pour devenir témoin. Témoin de ces métamorphoses. Témoin de cette humanité vibrante. Mutante. Cette humanité à laquelle j’appartiens.


De mon cœur à ton cœur. Je t’embrasse.

Ulysse

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