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Chant pour un départ


Nous sommes des guetteurs d’aubes.

De ces aubes insoupçonnables. Indiscernables.

Qui se sont un jour levées en nous, en l’autre. Nous guettons ces aubes improbables auxquelles plus personne ne croit. Nous savons de quelles obscurités elles reviennent. De quels chagrins, de quelles absences, de quels labyrinthes sans issue visible. Mais en nous, rien n’a renoncé. Et nous guettons, campés dans la présence. N’attendant rien parce qu’espérant tout… Nous savons ces aubes imprévisibles. Sauvages. Jamais aliénées à ce qui pré-existe. Rompant le sceau du toujours connu sans déchirer le manteau de cohérence et d’unité.

Oui nous sommes des guetteurs, ne le sens-tu pas toi aussi ? Notre présence s’enlace dans l’intensité de l’instant. Mouvement de vie qui ne cesse d’advenir. Qui ne cesse d’échapper à ce qui, en nous, voudrait le retenir ou l’empêcher. Nous offrons cette attention pleine, sans réserve, sans prédilection. Cette attention qui manque tellement, à tant parmi nous. Nous nous tenons dans ce léger retrait. Cette délicate discrétion qui saura ne pas effaroucher ce qui, peut-être, adviendra. Comme un espace offert. Un espace de rencontre et d’exploration. Lieu des nouveaux possibles. De la création fertile. Nous sommes des guetteurs ! Nous vibrons dans cette présence brûlante. Qui appelle, réclame, désire que la vie ne reste pas en retrait. Qu’elle surgisse. Qu’elle danse enfin de sa plus belle danse. Qu’elle résonne de son chant le plus neuf. Qu’elle s’accomplisse et qu’elle consente à habiter sa lumière et ses ombres.

Nous guettons l’aube parce que la vie n’en finit pas de se renouveler et de nous inviter dans ce mouvement. Source intarissable. Désaltérante. Vivifiante. Originelle. Bousculante. Insolente. Elle crie sur les toits de notre âme et par tous les pores de notre peau, qu’il est temps, toujours, de renouer avec cette proximité du vivant en nous.

Nous guettons l’aube parce que cette vie qui nous traverse vient de bien plus loin que nous, qu’elle nous dépasse, et qu’elle sera là, encore, bien après nous. Cette source de vie qui engendre et nourrit. Qui lave le regard et dénude le cœur. Cette source en nous qui bruisse. Délicatement. Qui nous tient en éveil et qui nous rappelle à notre sève. A cette singularité magnifique qui coule en nous et que nous sentons parfois dans l’intensité de nos silences.

Nous guettons l’aube… Nous apprenons à la reconnaître entre chien et loup. A avancer en aveugle, les sens déployés, le cœur nu, l’âme au bord des lèvres. A reconnaître la puissance dans le plus insignifiant. A voir la multitude des possibles dans le minuscule. Dans le presque rien. Dans ce que la majorité donnait pour mort. Ou pour trop faible.

Des guetteurs d’aubes, voilà ce que nous sommes… Et quand enfin nous verrons poindre l’or du matin, nous serons prêts à accueillir cette aube unique dans nos cœurs ébouriffés, comme une promesse d’amour. Comme une joie fraîche et inépuisable.


Ulysse


Ce texte est dédié à tous mes collègues …

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