Recommencer. Prendre le large. Entailler, une à une, les lianes tendres de nos racines naissantes. Livrer tous nos édifices au flot continu de la mer et à son mouvement pendulaire. Ruiner le temps. … Accueillir l’étreinte de nos cœurs divisés par le départ – Morsure exsangue. Consentir à ce déchirement sans plaidoirie. Couler mes bras autour de ton corps puis dans les étoffes blêmes de mon manteau. Chavirer ma nuque pour me mettre en partance. Regarder une fois encore par dessus mon épaule. Y trouver l’infiniment attendu, l’absolument espéré dans ton regard de brumes. Signer le ciel du balancement de mon bras. Quitter la berge. Rompre le sortilège qui nous rendait imprenables. Sentir soudain le froid de nos absences. Savoir qu’on ne reviendra pas. … S’éloigner jusqu’à ne plus distinguer. N’avoir aucun regret et tant de mémoires brûlantes. Déborder de chagrin et de gratitude mêlés. Échanger ses repères comme dans un tour de carte. Prolonger en secret les liens indivisibles. Éprouver cette part de soi laissée en gage et ne pas la reprendre. Consentir à l’œuvre d’oubli. A son érosion lente. … Cheminer entre les immensités. Terre, mer, ciel, âme. Métamorphoser les rythmes et puis les gestes dans cette solitude neuve. Faire silence, enfin. Commencer. Recommencer.
Ici et maintenant.
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